Inscription ou déscolarisation ?

Chez moi, ça fait deux jours qu’on fait péter les magnums de champagne comme si on avait remporté l’exploit de la décennie : inscrire l’aîné dans une école privée en classe de 6ème  alors qu’il sort du public !! Le marathon épuise les bourgeoises dont c’est le sujet de stress favori en hiver après la météo.

Au motif : « dossiers d’inscription », on a refusé toutes les invitations pendant un mois. Photocopies des bulletins scolaires depuis le CP, certificat de baptême, chèques pour frais, photos, lettres de motivation, enveloppes timbrées. J’ai rempli 10 dossiers. Je suis une pro. J’pourrais faire « nègre en dossiers d’inscription ».

Règle n°1 : dire OUI à tout : oui, je serai Dame KT, oui, j’adhère à l’APEL, oui, mon fils choisit allemand-russe. Il est très très doué !

Je sais aussi gruger les bulletins scolaires. Pas au Tipp-ex avec photocop’ bas de gamme. Naaan… Je suis une pro de Photoshop et j’ai donc mis tout mon talent au service de l’avenir de mon fils.  Le zèle, ça rend malhonnête.

En octobre et après 40 coups de fil pour lever du piston dans le corps enseignant, j’ai déposé les dossiers un à un devançant tous les autres : les privilégiés, les nantis, les fils à papas, les frères et sœurs des plus grands, les issus des Sainte Marie de la Noix et Notre Dame des Bons Faillots et ceux d’écoles de l’association Benoît XXIII (sic)… J’aurais du les rendre après. Je les ai doublés. Je sais, c’est petit, mais ma mère disait « Qui ne tente rien n’a rien ». J’ai TOUT tenté.

Première quinzaine de janvier, les courriers « nous avons le regret de… » se bousculent. J’ai le moral dans les omoplates et un torticolis chronique.  » Mais laisse-le dans le publiiiic « , me dit René mais alors complètement hors sujet. Il m’a tellement énervée que je suis devenue une ayatollah du privé. J’ai failli l’inscrire à Mater Dolorosa, dans la seule école qui le prenait – pardon – qui faisait du recrutement. Ambiance Le Cercle des Poètes Disparus, version banlieue grisouille avec uniforme vert bouteille et blanc, cravate et écusson sur la veste, école unisexe hors contrat aux frais de scolarité exorbitants. René a menacé de me quitter. J’ai fini par laisser tomber.

J’ai harcelé au téléphone la secrétaire et le directeur de l’unique établissement qui réservait sa réponse. Et le miracle s’est produit : un rv !!

Une femme au cheveu plat et grisonnant, jupe culotte bleue marine, et lèvre supérieure ourlée d’un duvet sombre m’entretient sur le projet éducatif et pastoral de l’établissement. J’opine du chef comme une première de la classe. J’ai bien briefé le petit : « tu es d’accord avec tout ce qu’elle dit. Après on s’arrange ». Surtout la conforter dans ses abus de pouvoir. Sur son bureau, la Bible me fait de l’œil. Seigneur pardonne moi. « Mon fils ? Oui, il est curieux, attentif et extrêmement cultivé, très tourné vers ses camarades. Il a fait un blocage en maths ? C’est vrai, un petit blocage en maths, mais ça se débloque les blocages. » J’y vais à fond.

Finie la génération « peut mieux faire ». Mon fils est une bête. Elle serait folle de ne pas le prendre.

Et ça a marché. A toutes les bourges qui m’énervent, je vais dire « mon fils rentre à Notre Dame de Neuilly. Bon, faut dire qu’il a un super niveau. Non mais attends laisse tomber. Ils ne prennent plus personne ».

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A propos les cap'fées

Journaliste, conceptrice-rédactrice sur les médias presse écrite et web...
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Un commentaire pour Inscription ou déscolarisation ?

  1. blanchard colette dit :

    Bravo ! Bravo ! Je suis émerveillée, mais dans le fond tout ceci ne me surprend pas … de toi. J’ai connu également certains problèmes, mais plus tard … si je me souviens bien c’ était pour René !

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